SPECIFICS : pour des systèmes riches en légumineuses et sans pesticides
Les enjeux de la transition agricole et alimentaire mettent les légumineuses à graines et leurs nombreux atouts au centre de l’agriculture de demain. Les légumineuses ont un rôle à jouer dans la préservation de la biodiversité, la limitation de l’utilisation d’engrais chimiques, les alternatives à la consommation de protéines animales pour l’alimentation humaine… mais de nombreux progrès restent à faire pour pérenniser leur production et limiter l’utilisation de pesticides.
Le projet pluri-disciplinaire SPECIFICS (Sustainable Pest Control In Fabaceae-rich Innovative Cropping System) vise à acquérir de nouvelles connaissances en génétique, en agronomie mais aussi en sociologie et économie pour répondre à ces problématiques.
Ce projet fait partie du Programme Prioritaire de Recherche « Cultiver et Protéger Autrement », lancé en 2019 par le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et par le Secrétariat Général pour l’Investissement.
L’équipe du projet SPECIFICS souhaite mobiliser les acteurs de l’amont et l’aval de la filière légumineuse et protéagineuse pour discuter des questions posées, des résultats obtenus en cours de projet et des orientations à réaliser. Pour permettre leur implication, l’équipe du projet SPECIFICS a organisé une matinée d’information le mardi 6 décembre 2022 ouverte aux porteurs d’enjeux de la filière. L’échange et le partage des différentes expertises étaient au cœur de cet événement.
Les présentations
Introduction – Judith Burstin (INRAE – UMR Agroécologie)
Le projet SPECIFICS ambitionne un double défi disruptif : Zéro pesticides et autonomie protéique.
Pour y répondre, il cible les systèmes sans pesticides et rompt avec les stratégies existantes qui visent seulement à améliorer les modalités d’usage des pesticides, et cela en concevant des systèmes dont les légumineuses bénéficient en terme de gestion des bioagresseurs, en impliquant l’ensemble de la filière pour soutenir la production de graines de légumineuses sans pesticides.
Pour parvenir à ces objectifs, l’interdisciplinarité du projet permet de cibler et intégrer différents leviers, au niveau de la plante, du système de culture, du système agricole, agro-alimentaire et au niveau de la société.
Le projet est coordonné par Judith Burstin et Stéphane Cordeau. Sandie Barbot est la chargée de projet.
Il est divisé en 4 axes de travail, appelés « workpackage » (WP).
Le projet implique 12 partenaires de recherche. Avec la participation de Terre Inovia/Univia pour leurs connaissances techniques sur les légumineuses et la filière protéagineuse.
La gouvernance du projet.
Le projet a besoin de tous les acteurs de la filière pour développer ensemble un chemin d’impact pour le projet. Ce chemin d’impact vise à faire en sorte que les connaissances produites dans le projet diffusent et servent au plus grand nombre. L’équipe du projet sollicite donc l’avis des parties prenantes sur les recherches et les valorisations envisagées et sur les impacts visés.
Détails.
WP1 – Leviers génétiques de la plante pour lutter contre les bioagresseurs des légumineuses – Marie-Laure Pilet-Nayel (INRAE – UMR Institut de Génétique Environnement et Protection des Plantes)
Le contexte actuel montre que la majorité des cultures de légumineuses à graines sont sensibles à de multiples maladies et ravageurs qui sont responsables de l’instabilité des rendements en France. Le Workpackage 1 se concentre sur les leviers de la plante pour améliorer la gestion de la santé des légumineuses et favoriser leur développement dans des systèmes sans pesticides.
Les objectifs sont :
- d’identifier des nouvelles sources de résistance et des traits protecteurs de la plante contre les bioagresseurs dans des systèmes de culture sans pesticides (Tâche 1.1)
- d’analyser et exploiter la conservation génomique entre les espèces végétales pour faciliter la découverte de gènes, intégrer les connaissances -omiques de la résistance aux bioagresseurs des légumineuses pour identifier et combiner des locus de résistance multi-bioagresseurs. (Tâche 1.2)
- d’analyser et comparer les mécanismes de défense des légumineuses face aux bioagresseurs pour diversifier leur utilisation en protection durable des cultures et identifier de futures cibles de sélection. (Tâche 1.3)
Détails.
WP2 – Intensification des régulations biologiques pour une lutte contre les bioagresseurs basée sur la biodiversité – Guénaëlle Corre-Hellou (Ecole Supérieure des Agricultures – Angers)
Le double challenge de SPECIFICS, qui vise la conception de systèmes riches en légumineuses et sans pesticides, nécessite des ruptures importantes.
Le projet doit avoir un raisonnement à l’échelle du système de culture pour viser une conduite sans pesticides sur le long terme. Au lieu de lutter contre les bioagresseurs en raisonnant uniquement de façon curative, sur le court-terme, via principalement l’usage de produits phytosanitaires, il faut réduire la présence des bioagresseurs (à un niveau suffisamment faible pour que les dégâts soient minimes) sur un pas de temps long. Pour se faire, la diversification des systèmes est un levier essentiel, afin d’intensifier les régulations biologiques. Il faut également combiner les dimensions temporelles et spatiales de la diversification des cultures et des pratiques pour diminuer les pressions biotiques et obtenir des rendements additionnels.
Le WP2 cherche à mettre en œuvre une gestion adaptative, avec une adaptation continue, des apprentissages, des combinaisons d’expertises et de la co-construction de systèmes. Il vise des actions à différentes échelles :
- Effets de différentes formes de diversité intra-parcellaire sur adventices, ravageurs, maladies ? (Tâche 2.1)
- Comment évoluent les pathogènes dans le sol au cours du temps ? Pouvoir suppressif des sols en relation avec les organismes du sol et la résistance de la plante ? (Tâche 2.2)
- Comment évolue une communauté de bioagresseurs dans ces systèmes diversifiés riches en légumineuses ? (Tâche 2.3)
- Approche multi-échelle du contrôle des ravageurs (Tâche 2.4)
- Comment guider et accompagner ces transitions ? Quels outils ? (Tâche 2.5)
Cette tâche s’appuie sur des essais systèmes de trois plateformes expérimentales et sur la connaissance experte.
Détails
WP3 – Performances de systèmes riches en légumineuses sans pesticides et conditions de leur développement : des systèmes de production aux marchés – Violaine Deytieux (INRAE – Unité Expérimentale U2E Domaine d’Epoisses)
Le double enjeu du projet SPECIFICS fait face à des impasses techniques, un manque de conseil et de ressources et à des marchés et organisations peu favorables aux légumineuses à graines. Il est important de conserver les bénéfices des légumineuses dans les systèmes de culture, de produire des protéines végétales et surtout d’innover tout au long de la chaine de valeur, c’est l’objectif du WP3.
- Au niveau des systèmes agricoles : analyser la durabilité des systèmes de culture et identifier les meilleures stratégies (Tâche 3.1)
- Au niveau des marchés en aval : Identifier les tendances du marché alimentaire et les entreprises engagées dans la transition (Tâche 3.2)
- Au niveau de l’organisation socio-économique et des arrangements organisationnels : qu’est-ce qui favoriserait la mise en œuvre d’alternatives aux pesticides ; quelles nouvelles formes de contractualisation et d’organisation pour engager les parties prenantes dans de nouveaux systèmes (Tâche 3.3)
Détails
WP4 – Communication et formation – Stéphane Cordeau et Judith Burstin (INRAE-UMR Agroécologie)
Le WP4 souhaite s’assurer de la promotion des actions et des acquis du projet SPECIFICS pour les personnes extérieures au projet. Nous avons prévu un certain nombre de livrables durant les 6 ans du projet, mais avec pour objectif d’en fournir aussi au-delà de la date de fin du projet. Il est prévu notamment :
- Des publications techniques et scientifiques pour développer ces systèmes riches en légumineuses et sans pesticides
- Des références sur des systèmes riches en légumineuses et les services écosystémiques associés dans un contexte sans pesticide.
- Des références sur l’impact des bioagresseurs dans ces systèmes, notamment sur le long-terme (dynamiques de bioagresseurs, dynamiques de cultures, itinéraires techniques)
- Des méthodes d’évaluation et des références sur la multi-performance de ces systèmes de culture (rendement protéique, efficience énergétique…)
- Des actions pédagogiques (déjà engagées et à développer), création d’outils pédagogiques utilisables à l’extérieur du consortium de partenariat, création de fiches techniques synthétisant la connaissance sur la biologie des bioagresseurs, des auxiliaires, les techniques de gestion et leur mode d’action.
- Mise à disposition de bases de données en libre accès (data verse), pour les données génétiques, génomiques et phénotypiques des légumineuses
Les canaux de communication : Pensez à vous abonner pour suivre !
- Le Site Internet avec des actualités à suivre, et des informations d’ordre général
- Réseaux sociaux : LinkedIn - Research Gate - Twitter - YouTube
- Publication dans les médias
- Site Internet du Programme « Cultiver et Protéger Autrement »
Constitution du Comité Consultatif du projet SPECIFICS
Objectif : réunir les acteurs autour du projet afin de concrétiser les sorties du projet en impacts sur la société et l’ensemble des parties prenantes à partir des résultats de recherche obtenus.
Ces impacts à court-terme et à long-terme dépendent de toute une chaîne de transfert de l'information de la recherche, qui doit se diffuser à travers notamment l'existence de ce comité consultatif, et de la communication entre acteurs durant la vie du projet et au-delà.
Ce comité est l’occasion de faire remonter les attentes des parties prenantes et de développer un projet très transversal.
FAQ
Qu’en est-il de la bactériose sur pois ? Travaillez-vous ce bioagresseur dans le projet ?
La bactériose est un problème connu sur pois d’hiver, elle est identifiée, mais pas spécifiquement travaillée dans ce projet. ). Des connaissances existent, elles sont disponibles dans la littérature (travaux espagnols notamment, sur des loci de résistance)et. En France, nous avons besoin davantage connaissances sur les races présentes avant dans nos travaux. aller plus loin dans le criblage de sources de résistance. Ces connaissances sont en cours d’acquisition dans le projet PHENOLAG. Il était donc prématuré à l’initiation du projet SPECIFICS d’inclure des travaux sur la bactériose, mais cela reste important à garder en tête pour la suite.
Est-ce un choix délibéré d’avoir axé le projet uniquement sur pois, féverole, lentille ? Pourquoi pas des légumineuses fourragères pérennes par exemple, notamment celles avec des résistances aux pucerons ? Qu’est-ce qui a motivé ces choix ?
Pour le WP1, on est parti sur ressources et les connaissances acquises et les compétences du consortium. Dans la tâche 1.2, l’idée est de rassembler l’ensemble des connaissances de génétique sur les légumineuses, y compris les légumineuses fourragères dans une base de données. On essaie de connecter notre projet aux connaissances d’autres projets en cours. On ne peut malheureusement pas tout faire au sein de SPECIFICS, mais on réfléchit à comment appliquer à d’autres espèces par la suite ce que nous sommes aujourd’hui capables de faire sur certaines espèces. On développe des approches translationnelles en faisant le pari que ces approches pourront aider à aller plus vite sur le développement de l’ensemble des légumineuses. L’outil database intégratif sera « extrapolable » à l’intégration de génomes luzerne ou autre.
Est-ce que vous regardez les approches sur d’autres modèles variétaux, sur des approches variétés-population ou multi-lignées ? Pour pouvoir gérer les multi-resistances ?
L’idée est que nos résultats soient adaptables à différents types variétaux. Actuellement, on travaille sur des ressources génétiques et du matériel de type « lignée », pour identifier des loci, des allèles et des marqueurs qui tracent ces locus/allèles de résistance, et pour qu’on puisse ensuite les exploiter dans différents types variétaux. Le speed-breeding est une preuve de concept qui est appliquée dans le projet pour le pois, pour créer des « lignées » par back-cross assisté par marqueurs. Les marqueurs et sources de résistance générées seront utilisables plus largement.
La question de la synthèse d’une variété de féverole est importante, on ne la pose pas dans ces termes-là dans le projet SPECIFICS, mais il y a quand même une partie dans le WP2, plus ciblé sur la lutte contre les adventices, qui traite des mélanges variétaux intraspécifiques, On y réfléchissait initialement sur le pois, mais on peut envisager d’y réfléchir sur la féverole (même si pour les adventices, il y a moins de problèmes avec la féverole).
La problématique « bruche » est également importante notamment pour la notion de qualité de commercialisation. Quels sont les axes de travail dans le projet sur ce dossier ?
Beaucoup de choses ont déjà été travaillées sur cette thématique. Il y a eu de nombreux acquis dans des projets parallèles sur des sources de résistances, des métabolites volatils de la plante potentiellement impliqués dans les interactions avec la bruche, des marqueurs et des loci de résistance chez la féverole et chez le pois (projet PeaMUST, projet RESIBRUCHE, et projet européen PROFABA). Dans le projet SPECIFICS, on ne va pas cribler de nouvelles sources de résistance mais on va intégrer l’ensemble de ces loci identifiés (tâche 1.2), les projeter sur les génomes, et certains loci de résistance à la bruche sont ciblés dans l’approche de Speed-breeding. On a une masse de données disponibles et l’idée est de les intégrer pour fournir des outils à la sélection. En dehors des aspects génétiques (WP1), d’autres travaux seront réalisés dans le projet SPECIFICS, au niveau des régulations biologiques, de la conduite des systèmes de culture, et des évaluations au champ des stratégies de gestion de la bruche .
Quel est le risque à long terme de mettre trop de féveroles dans les systèmes, en interculture dans les couverts végétaux et en plantes compagnes, etc… ?
C’est à ce jour difficile à dire. C’est en partie l’objet de ces plateformes d’essais long-terme, d’étudier les risques, dont nous sommes conscients, de systèmes « trop » riches en légumineuses, pour guider les choix d’espèces/variétés. Dans les systèmes étudiés, on a un gradient (pourcentage) de légumineuses, et une diversité de différents types d’usages de ces cultures de légumineuses (principale, couvert, culture associée…), et on évalue sur le long-terme les dynamiques des bioagresseurs et auxiliaires. Par rapport à ce qui est déjà pratiqué sur la plateforme CA-SYS, on est plutôt content de la féverole et de ses services, car elle limite la multiplication d’Aphanomyces euteiches, et on a donc tendance à l’utiliser fréquemment dans les systèmes, notamment pour remplacer les pois. Sur la plateforme CA-SYS, dont les sols ont un fort potentiel infectieux dû à ce pathogène, on utilise principalement le pois en culture associée, et peu en couvert d’interculture. On utilise la féverole en tant que culture, pure ou associée, plante compagne, couvert d’interculture etc. On a, en revanche, constaté des développements importants de rouilles au niveau des féveroles, ce qui nous a amené à nous poser cette question de l’entretien de l’inoculum de rouille dû à la fréquence trop élevée de féverole. Cette question ça adresse des connaissances de phytopathologiste. On a également des légumineuses dans des infrastructures agroécologiques, qui servent de refuges pour des insectes auxiliaires notamment, mais peuvent aussi être des réservoirs de bioagresseurs.
Dans la tâche 5 du WP2, tâche intégrative, l’objectif est de faire le point sur ce type de connaissances et de les rendre accessibles.
Quel est le bénéfice (économie en fertilisation en azote minéral sur la culture suivante) de la restitution d'un couvert végétal d’interculture de type biomax avec 100 % de légumineuse dans des systèmes de culture conduits en ACS ?
Cela pourrait être traité dans l’évaluation multicritère, mais pour cela il faudrait des mesures pour pouvoir le faire. Cette question est pertinente. On utilise des légumineuses comme engrais vert pour essayer de restituer de l’azote dans les systèmes, c’est particulièrement le cas dans certains systèmes qu’on expérimente dans le WP2, notamment le système TS2 sur la plateforme CA-SYS (sans fertilisation depuis 4 ans). Sur tous les autres systèmes que l’on a dans le projet, notamment en ACS, c’est vrai que jusqu’ici on a du mal réduire la fertilisation azotée minérale, même si les engrais verts sont restitués. à la parcelle. C’est particulièrement le cas dans des systèmes où on ne travaille pas le sol, parce que la minéralisation n’est surement pas la même. Ce n’est pas une question qui va être étudiée dans SPECIFICS, car le projet se concentre sur la gestion des bioagresseurs face à la problématique « sans phyto ». Pour autant, les légumineuses dans les systèmes apportent ces services là et pour cela, il faut qu’elles se développent sans être trop affectées par des ravageurs/maladies. Donc, on s’est déjà posé la question sur l’évaluation des systèmes d’évaluer à quel point les services connus des légumineuses (fixation, restitution d’azote) pouvaient être entachés dans le cadre d’une conduite sans pesticides. On n’a pas encore toutes les connaissances pour le faire, on essaiera d’aborder ces questions dans SPECIFICS, mais toujours sous l’angle « à quel point la conduite sans pesticides pourrait entacher les services rendus par les légumineuses ? » (rendements protéiques, services aux systèmes). On sera capable de regarder l’efficience en azote du système, de décrire et comprendre les stratégies d’introduction des légumineuses dans des systèmes multiperformants identifiés dans le réseau de fermes DEPHY.
Comment vous appréhendez le besoin de phosphore dans ces systèmes ?
Dans SPECIFICS, on utilise 3 dispositifs expérimentaux, qui diffèrent au niveau de la gestion du phosphore et potassium. Sur CA-SYS (Dijon), on ne fertilise plus en P/K depuis 2018, car les sols sont fortement pourvus or de trop haute teneur en P empêchent la mycorhization. CA-SYS met en avant le fait d’utiliser la biodiversité (cultivée et sauvage) comme moyen de production, et donc les relations avec les microorganismes du sol. Il fallait absolument faire redescendre les teneurs en P/K pour pouvoir bénéficier de ces processus biologiques. Ce n’est pas le cas sur les autres dispositifs. Notamment sur ABY (Bourges), dans des systèmes associés à l’élevage, où il y a de la fertilisation minérale et organique avec des épandages de digestats de méthanisation issus d’effluents d’élevage.
Ces filières sont souvent des filières de niche à forte valeur ajoutée, très sensibles aux fluctuations des marchés qui peuvent dégrader la valorisation, tant en alimentation humaine qu'animale. Sur quelles projections de marchés pensez-vous travailler ?
Les opportunités de marchés vont être analysées par les économistes de Toulouse qui sont dans le projet SPECIFCS, via l’analyse des innovations produits à base de légumineuses à graines pour l’alimentation humaine et des labels environnementaux associés.
Quand on évaluera les performances économiques des systèmes, on peut s’intéresser à des scénarios de prix qui rendent compte des fluctuations du marché et ainsi identifier les moments où les performances économiques décrochent.
Est-ce qu’il y aura des livrables en direction des décideurs publics, pour développer des politiques de soutien pour structurer et stabiliser des filières sur le long-terme ?
Au sein du projet, on va tout d’abord tenter d’identifier des antagonismes, afin de montrer des freins au développement, et de tenter d’établir des stratégies gagnant-gagnant. L’idée étant de rester très ouverts et d’aller pourquoi pas vers ce type de livrables. Ce projet public est là justement pour imaginer les difficultés de la conduite de ces systèmes sans pesticides, identifier des leviers à la fois au niveau technique et socio-économique, et questionner ce que serait l’impact de la création d’une filière protéines végétales sans pesticides. Nous allons tenter de répondre à cette question, jusqu’à potentiellement déboucher sur un livrable pour les décideurs. Tout du moins ils pourront être informés des sorties de notre projet.
Est-ce que la dimension machinisme agricole sera abordée ?
Ce seront des questions qui seront abordées dans le WP2 (notamment le cas des cultures associées) mais pas traitées au sens de question de recherche. Nous n’avons pas de spécialiste du machinisme dans le projet. On est d’accord sur le constat que les innovations que l’on peut imaginer dans le projet ne peuvent se réaliser chez des agriculteurs que si le machinisme lève certains verrous. Pour cela, on va interagir davantage avec ce domaine de compétence, qui n’est actuellement pas dans le projet. Sur certains essais, l’idée peut être aussi de ne pas imaginer seulement les deux espèces que l’on sème et que l’on récolte en même temps, imaginer des décalages, qui permettra par exemple de mieux réguler une plante de service, de gérer mieux l’implantation, etc.
Est-ce que mobiliser l'agroforesterie est envisagé dans les innovations ?
Non, pas dans ce projet. Nous n'avons pas de dispositif dans lequel ce levier agroforesterie est vraiment mobilisé, sauf sur CA-SYS où des haies sont implantés autour du dispositif mais pas avec une dominance d’espèces légumineuses ligneuses évidemment. Les infrastructures agroécologiques sont étudiées dans le cadre des services qu'elles peuvent rendre à la fourniture de pollen et de nectar et au maintien d’un habitat pour les auxiliaires impliqués dans la régulation biologique des bioagresseurs des légumineuses. Mais on n'a pas vraiment de focus sur le rôle des linéaires arborés et surtout, on n'a pas d'agroforesterie intra parcellaire dans les dispositifs.
Est-ce que les aspects changements climatiques sont abordés dans le projet ? Est-ce que les aspects « date de semis » pourraient, par exemple, être explorés, pour éviter certains stress biotiques ou abiotiques ?
Dans le cadre du projet SPECIFICS, on adapte les dates de semis de toutes les cultures (dont les légumineuses) aux conditions environnementales observées. On est plus dans une démarche d’adaptation au changement climatique qu’on subit, que dans une démarche d’anticipation. On peut se dire qu’on va complètement déphaser le semis des cultures pour pouvoir contourner des vols de bioagresseurs, ou contourner des périodes difficiles.